Imprimé depuis le site Archives du Formindep / publié le mercredi 5 octobre 2011

Investigation de l’épidémie apparente de cancer du sein en France

Deux écoles d’épidémiologie contribuent à la connaissance des maladies en population. L’une, académique, applique des définitions de maladies établies a priori pour décrire leur fréquence et opérer des comparaisons afin d’identifier les facteurs explicatifs. L’autre, plus pragmatique , fut notamment développée sous l’impulsion d’Alexander Langmuir, précurseur de l’ Epidemic Intelligence Service aux Centers for Disease Control and Prevention des États-Unis : elle privilégie les moyens de décrire la survenue d’une épidémie en commençant par vérifier que l’augmentation de la concentration des personnes atteintes de la maladie dans le temps et dans l’espace est réelle. Si l’épidémie est vraie, il s’agit alors d’explorer les facteurs de risque modifiables pour résoudre le problème par une intervention appropriée.

Classiquement, le cancer considéré comme maladie chronique définie selon des critères histologiques ne se prête pas à l’investigation d’un phénomène épidémique. Mais à cause de l’interventionnisme médical consécutif à la promotion du dépistage, on assiste aujourd’hui à une augmentation considérable de la fréquence des diagnostics de cancer du sein en France. Le titre de l’article précise le type d’approche pragmatique de cette recherche : l’investigation d’une épidémie, en vérifiant la nature des problèmes de santé en cause.

La conclusion de l’investigation apparaît d’emblée : l’épidémie est dite apparente, ce qui signifie que la fréquence de la vraie maladie cancéreuse du sein n’a pas évolué significativement en France. La technique d’observation est aussi précisée dans le titre : les populations de femmes d’un âge donné à une certaine période du calendrier constituent des cohortes de naissance qui seront suivies dans le temps. Cette approche permet d’évaluer la fréquence des diagnostics dans des populations comparables exposées à des activités de dépistage contrastées : relativement peu intenses de 1980 à 1990 et relativement plus intenses de 1995 à 2005.

Cette prise de recul au sein même de la discipline épidémiologique permet la quantification du défaut de définition de la maladie cancéreuse par l’histologie dans un contexte de dépistage. Le clinicien ne peut procéder de la sorte dans le cadre de son activité auprès des malades. Ce sont seulement des comparaisons entre populations qui apportent la réponse à la question de la validité de l’examen diagnostique de référence : l’histologie.

Cet article qui réunit des auteurs d’Europe [1] et des États-Unis [2] ouvre le débat sur la pertinence des critères actuels appliqués lors d’une biopsie ponctuelle pour définir le cancer. De ce fait, il remet en question le bien-fondé du dépistage.

Cliquez sur un des fichiers ci dessous pour accéder à l’intégralité de cet article dans sa version anglaise originale et dans une adaptation française.

Adaptation française
English version

[1Bernard Junod, Per-Henrik Zahl (Institut norvégien de santé publique, Oslo, Norvège)

[2Robert M Kaplan (Université de Californie Los Angeles (UCLA), Ecoles de santé publique et de médecine, Los Angeles, USA), Jørn Olsen (Département d’épidémiologie, École de santé publique, UCLA, Los Angeles, USA), SanderGreenland (Département de Statistique et département d’épidémiologie, École de santé publique, Facultés de lettres and de science, UCLA, Los Angeles, USA)