Fermer

Faire un don

Rappel des status de l'association FORMINDEP

Article 8 - Ressources

Le conseil d’administration, en cas de doute, s’assure que l’origine des dons, avantages ou subventions proposés à l’association ne contreviennent pas aux objectifs de l’association précisés dans l’article 2 des présents statuts.

Les ressources de l’association comprennent :

Le Formindep étant une association reconnue d’intérêt général, faire un don génère l'envoi par courriel d'un reçu fiscal permettant une réduction d'impôt.


l'association Formindep

S'abonner à notre lettre d'information

Espace Adhérents

Actualités

Actualités

illustration d'actualités

Santé, le trésor menacé

Les éditions L’Atalante publient à la fin du mois de janvier, le dernier ouvrage d’Antoine Vial : Santé, le trésor menacé. Nous l’avons lu.

Actualités

illustration d'actualités

Les facs de médecine les plus indépendantes vis-à-vis de l’industrie pharmaceutique

Paul Scheffer, Université Paris 8 – Vincennes Saint-Denis Lien vers le site dédié FACS.FORMINDEP.ORG C’est une première en France. Les (…)

La transparence est une course de fond- Loi "sunshine" : quatre ans et toujours pas appliquée

Illustration Le 21 janvier 2016, le Conseil Constitutionnel jugeait l’article 178 de la loi « modernisation de notre système de santé » conforme à la Constitution. La transparence des contrats des personnels de santé avec les industries de santé serait-elle enfin acquise ? Retour sur 4 années de tergiversations, 4 années d’obstruction des firmes, des élus, du gouvernement, (…)

Dépistage organisé du cancer du sein

Un dépistage inadapté au génie évolutif de la maladie, condamné à l’inefficacité.- Démystifier le diagnostic précoce par la mammographie

Illustration Le cancer du sein est un modèle pour la cancérologie classique. Il siège dans un organe externe, facile d’accès, non vital, susceptible de chirurgie radicale. Le diagnostic peut être fait pour de petites tumeurs à peine palpables et quelquefois, grâce à l’imagerie, pour des lésions millimétriques infra cliniques. Ainsi, tous les ingrédients semblent réunis pour (…)

Vous êtes ici

Accueil
Imprimer Flux RSS A+ A- Voir les commentaires
jeudi 8 octobre 2015

Dépistage organisé du cancer du sein

Un dépistage inadapté au génie évolutif de la maladie, condamné à l’inefficacité.

Démystifier le diagnostic précoce par la mammographie

Le cancer du sein est un modèle pour la cancérologie classique. Il siège dans un organe externe, facile d’accès, non vital, susceptible de chirurgie radicale. Le diagnostic peut être fait pour de petites tumeurs à peine palpables et quelquefois, grâce à l’imagerie, pour des lésions millimétriques infra cliniques.
Ainsi, tous les ingrédients semblent réunis pour faire du dépistage organisé un vrai succès. Pourtant çà ne marche pas. Voici pourquoi :

L’histoire naturelle retenue dans les années 80 pour justifier le dépistage reprend le
schéma « Halstedien ». Elle est vue comme un développement progressif loco régional avec généralisation secondaire, comme un processus linéaire dans le temps, où un stade engendre de façon mécanique et inéluctable le suivant en l’absence d’intervention humaine : cancer in situ - > cancer invasif - > métastases -> décès.

Selon cette hypothèse, une lésion de petit volume signifierait une lésion diagnostiquée “ précocement ”. Petit et précoce seraient synonymes de curable.
A l’époque, on pensait qu’une taille tumorale moyenne de 1,8 cm lors du diagnostic serait le seuil sous lequel le problème du cancer du sein appartiendrait au passé.

On estimait le temps moyen de “doublement” de la taille tumorale à environ 100 jours, ce qui signifiait un délai de 7 à 8 ans pour passer de la première cellule maligne à une tumeur de 5 mm, un délai de 10 ans pour que la tumeur soit palpable. La mammographie précèderait donc la clinique de 2 à 3 ans.
Dans l’hypothèse « Halstedienne » :
 la dissémination tumorale se fait mécaniquement.
 donc le type d’intervention détermine le devenir de la patiente.
 tout retard de diagnostic est préjudiciable.

On affirmait également en 1989 (Tours 11èmes journées de la SFS) que toutes les conditions nécessaires à la justification du dépistage étaient réunies :
a) Une forte prévalence de la maladie
b) Une absence de prévention primaire connue
c) Une phase suffisamment longue durant laquelle il est possible de guérir la maladie
d) Un traitement curatif qui n’altère pas la qualité de vie
e) Un test non iatrogène, spécifique et sensible avec de bonnes valeurs prédictives positives et négatives.
f) Un test simple, moins coûteux que l’examen diagnostique traditionnel (un seul cliché sur chaque sein)

De ce bel échafaudage, seuls les points a) et b) correspondent à la réalité. Tous les autres sont en complète contradiction avec les faits.

Ce qui condamne le dépistage n’est pas sa technique ou son organisation, qui n’ont cessé d’être améliorées depuis 20 ans. Ce qui le condamne, c’est qu’il repose sur une appréciation fausse du développement de la maladie. Ainsi, plus on l’améliore techniquement, plus il devient pervers.

Le dépistage s’est montré très vite non pertinent en pratique. Au lieu de reconnaître ses limites conceptuelles, on ne s’est intéressé qu’à ses insuffisances techniques et l’on est passé, sous couleur d’amélioration, à un dépistage reposant non plus sur un test mais sur un examen de diagnostic personnalisé, sans avoir étudié suffisamment les conséquences délétères de cette démarche.

La recherche par mammographie d’un diagnostic soit disant précoce est un leurre.

Le schéma Halstedien de l’histoire naturelle du cancer du sein justifiant un dépistage est contredit par les constatations cliniques : le développement de la maladie n’est ni inéluctable (on peut observer des régressions) ni linéaire (stagnation possible de l’évolution sur de nombreuses années) ni mécanique (un état n’engendre pas forcément le suivant, l’augmentation du nombre d’in situ diagnostiqués ne s’est pas accompagnée d’une diminution du nombre des invasifs). (Welch).

Par ailleurs, le lien établi entre la taille de la tumeur et le pronostic a été abusivement corrélé à la notion de diagnostic précoce pour les petites lésions, sous prétexte qu’une lésion a été petite avant d’être grosse.

Dès 1963, Ch. Gros, dans son livre « Les maladies du sein », notait : « Le diagnostic utile, c’est-à-dire celui qui donne à la malade les plus grandes chances d’efficacité thérapeutique, n’est pas synonyme de diagnostic précoce : il n’y a pas un parallélisme rigoureux entre le diagnostic précoce dans le temps et précoce dans l’espace. »

La notion de précocité du diagnostic suppose que la croissance de la tumeur et l’écoulement du temps soient dans un rapport de proportionnalité avec des évolutions parallèles. Dans cette configuration, une petite tumeur correspondrait à un diagnostic précoce, une grosse à un diagnostic tardif.

La corrélation absurde entre taille tumorale et précocité du diagnostic est contredite par les faits.

Petit ne signifie pas précoce, volumineux n’exclut pas un diagnostic précoce. Des tumeurs peuvent rester stables, d’autres régresser, disparaître, être grosses en quelques jours. Des tumeurs millimétriques peuvent être métastasées.
En pratique, la fréquence des cancers de l’intervalle a conduit à raccourcir sans cesse le délai entre deux vagues de dépistage, en faisant fi des a priori non fondés qui ont volé en éclats (10 ans pour que la tumeur soit palpable) et qui prétendaient valider une histoire naturelle unique du cancer du sein compatible avec le dépistage.
Fisher et Veronesi, dans les années 70, ont remis en cause l’hypothèse Halstedienne par des études randomisées. Ils ont avancé une hypothèse alternative :
il n’y a pas d’ordre dans la dissémination de la tumeur.
Ils ont montré que les variations de traitement n’affectent pas la survie et ont ouvert ainsi la voie à la chirurgie conservatrice.

Les résultats du dépistage démontrent que les bases théoriques sur lesquelles il se fonde sont fausses. Ils sont venus confirmer ce qui était prévisible sur la base de l’observation clinique.

L’épidémiologie constate l’échec du dépistage et confirme qu’il faut abandonner le schéma linéaire et mécanique de l’histoire naturelle des cancers du sein pour comprendre la maladie.

Le dépistage n’a pas fait la preuve de son efficacité :

« Il n’y a pas de preuve sûre de l’efficacité du dépistage », affirmait déjà en 2000 la Cochrane.
Pour trouver une baisse de mortalité liée au dépistage, il faut inclure dans les méta-analyses les plus mauvaises études randomisées au regard de la méthode de tirage au sort, de la comparabilité des groupes, des exclusions en cours d’étude après randomisation, du biais de classification des causes de décès en faveur des groupes dépistés. Les études randomisées les moins mauvaises, qui ont fait l’objet d’audits, n’ont pas trouvé de baisse de mortalité (Canada I,II).
Les études en population (P. Autier, K.J.Jorgensen, , Harding, Zahl etc …) confirment l’absence de résultat : là où la mortalité par cancer du sein baisse, la baisse est identique dans les groupes dépistés et non dépistés.
Il n’y a pas de régression des formes évoluées.
Il n’y a pas de diminution du nombre de mastectomies totales.

Le dépistage peut nuire à la santé :

L’irradiation répétée liée aux mammographies peut induire des cancers du sein.
Il existe une suspicion d’aggravation de la maladie par intervention sur certaines formes de cancers révélés par dépistage (B. Junod ).
Le dépistage crée du surdiagnostic avec toutes ses conséquences, dont le surtraitement, etc…
Le bénéfice n’étant pas prouvé, les effets pervers sont inacceptables.

Un invité surprise à la table du dépistage est venu tout bouleverser : le surdiagnostic

Le surdiagnostic est un phénomène potentialisé par le dépistage, dont personne n’avait vu l’importance.
Il correspond à des cancers en excès, d’autant plus nombreux que le dépistage est plus intense. C’est le diagnostic histologique d’une “maladie” qui, si elle était restée inconnue, n’aurait jamais entraîné d’inconvénients durant la vie de la patiente.
Dans le contexte de nos connaissances actuelles, ce n’est pas une erreur de diagnostic, c’est un diagnostic correct mais sans utilité pour la patiente. Il constitue une catégorie hétérogène.
Il est une explication des contradictions entre le succès apparent des traitements sur des cancers diagnostiqués “précocement” grâce au dépistage et l’absence de réduction significative de la mortalité.
Le surdiagnostic, outre qu’il est un phénomène massif, a des conséquences immenses. Il remet en question par sa simple constatation toute la cancérologie du sein (définition et histoire naturelle). Ce concept, contre-intuitif au regard de notre vision actuelle du cancer, ébranle les certitudes sur lesquelles s’appuient nos pratiques diagnostiques et thérapeutiques. Il impose une redéfinition de la maladie cancéreuse, uniquement basée jusqu’à présent sur l’histologie de la tumeur d’organe.
Il pose clairement les questions : à partir de quand est-on malade ? Pourquoi meurt-on d’un cancer du sein ? Où l’instigateur d’une mort programmée se cache t-il ? Pourquoi des cancers n’évoluent pas ou régressent ? Quel est le rôle réel de la tumeur du sein dans la maladie cancéreuse ?

En résumé

La notion de précocité du diagnostic liée à la taille de la tumeur est un non sens, on ne sait même pas quand commence la maladie.
Notre conception de l’histoire naturelle de la maladie est à réécrire complètement. Ne pas le reconnaître et poursuivre le dépistage par mammographie ne peut qu’être préjudiciable aussi bien aux personnes qu’à la population.
Les leçons à tirer des résultats du dépistage peuvent être un puissant levier pour la recherche. La reconnaissance du surdiagnostic avec toutes ses conséquences devrait d’ores et déjà modifier les pratiques médicales, dédramatiser l’urgence diagnostique, déculpabiliser les sceptiques, relativiser les certitudes, inciter le corps médical à être plus modeste et moins péremptoire dans ses propositions, en particulier concernant le dépistage en l’absence d’un rapport bénéfice/risques favorable prouvé.

Bernard DUPERRAY

Commentaires répondre à cet article

AVERTISSEMENT : les commentaires postés en réponse aux articles n'engagent pas le Formindep et sont publiés sous la seule responsabilité de leurs auteurs.

Le forum bénéficie d'une modération a priori. Les commentaires anonymes ou identifiés par un pseudo, ou ne respectant pas les règles légales ou de bienséance ne seront pas publiés.

  • vendredi 15 janvier 2016 - par sylvie Repondre

    Un dépistage inadapté au génie évolutif de la maladie, condamné à l’inefficacité.

    Je suis rassurée, enfin un oncologue qui dit la vérité,il y a encore beaucoup de travail à faire sur le cancer du sein et tous les cancersd’ailleurs.
    Il faudra un jour parler de la chimiothérapie et de la radiothérapie qui , pourraient être plus nocives ( et même inutiles parfois) que l’on ne veut admettre pour le moment .
    Mille merci pour cet article ,tout ce que je souhaite, c’est que les oncologues du monde entier vous suivent !

  • mercredi 20 janvier 2016 - par claire smith Repondre

    Un dépistage inadapté au génie évolutif de la maladie, condamné à l’inefficacité.

    Merci pour ces informations précieuses et cet autre regard que je n’ai malheureusement pas croisé dès que j’ai été happée par la machinerie Curie.
    Ponction, ablation, radiothérapie, vit, vite, vite. Aujourd’hui, hormonothérapie et une qualité de vie qui a chuté en quelques mois. en 6 mois, j’ai pris 10 ans.
    Dommage que je n’ai jamais eu vent de ces études qui remettent en question sérieusement la grosse machinerie.
    Notre rôle de femmes et de patientes est de disséminer ces informations !

  • mardi 15 mars 2016 - par Marie-Pierre Repondre

    Un dépistage inadapté au génie évolutif de la maladie, condamné à l’inefficacité.

    Je ne suis pas laissée faire pourtant cela aurait été plus simple, on a tellement besoin d’être pris en charge quand on apprends que l’on est atteinte d’un cancer du sein,... Mais la pression que me met l’oncologue car j’ai arrêté l’hormonothérapie après 3 mois... Je me pose aussi des question sur l’IRM, au moment du 1er IRM on découvre 4 boules qui répondent positif en plus de la tumeur. J’ai donc eu droit à 4 biopsies supplémentaires pour un résultat nul. en septembre 2015 re IRM et re-écho positif... J’attends le mois prochain pour refaire une échographie, mais je ne me crois pas malade et je me demande l’intérêt de prescrire un IRM à quelqu’un qui réponds positif là ou il a du négatif...

  • dimanche 3 avril 2016 - par guirette rené médecin Repondre

    Un dépistage inadapté au génie évolutif de la maladie, condamné à l’inefficacité.

    Je vais recevoir bientôt une dame, une professionnelle de la mammographie à mon cabinet, sa visite ayant pour but de me convaincre de prescrire plus de mammographies. En effet mon score au ROSP est faible (pour les profanes c’est un indice de performance rétribué par la sécu, en bref du pognon à la quantité de prescription de mammo) et même que j’explique aux dames que ce serai peut-être pas plus mal de ne pas faire cette irradiation et écrasement des seins sans raison, enfin que c’est pas obligé, que y’a pas à se sentir coupable de ne pas la faire cette mammo... mais que je lui prescrits si elle y tient tant.
    C’est une pro de la com que je vais donc recevoir, et je n’imagine pas qu’elle ne puisse contrer tous les meilleurs arguments anti-mammographie, à fortiori les miens.
    Même si je ne suis pas sûr qu’il faille les faire ou non, finalement, tant les arguments sont divers et pertinents, et que le "dernier son de cloche" me parait bien souvent pertinent, surtout les anti.

    Mais la raison pour laquelle je ne proposent pas forcement le dépistage est à mon sens assez nulle médicalement parlant. Si une femme fait son cancer du sein, découvert un peu plus tôt ou plus tard et bien c’est affreux de toute façon, et peut-être qu’à cause de moi ses chances de survie seront moindres à cause du retard.
    Mais parallèlement à ce drame, si à une femme qui n’avait rien, ne se plaignait de rien et n’aurait jamais fait de cancer, par mon action de prescription je lui en trouve un, un cancer, grâce à la mammo, et que même elle va me remercier de lui avoir trouvé si tôt son cancer, merci le dépistage !!! merci docteur !!! et qu’elle peut en mourir de "son cancer" qu’elle n’avait pas, mourir à cause des supers traitements qu’elle n’auraient jamais dû recevoir, ou simplement que maintenant elle est une cancéreuse, qu’elle n’est pas morte, mais juste mutilée-mammectomiée, sans libido, larguée par son mari, et que sais-je, mais quand même "Merci Docteur !"... bref cette femme la j’ai le devoir de la protéger de la médecine, des médecins et de moi-même et de la prime à la mammographie. Et de mon moins de vu, non-médecin, il vaut mieux dix retards au diagnostic qu’une bien portante que je vais rendre malade et qui ne me demandait rien. Et c’est juste là un point "pillier" de ma pratique : ne pas nuire d’abord, même si c’est un delit statistique...
    primum non nocere... PRIMUM !
    Le "conflit d’intérêt moral majeur" est évident : dans tous les cas prescrire de la mammographie à tout va ne nous rapportera que des remerciements et de la reconnaissance des toutes les victimes du cancer et du dépistage systématique. Quant à celle qui n’aurait jamais fait de cancer en la protégeant du dépistage, elle ne sait même pas...