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lundi 2 mars 2015

Dépendance tabagique

SPINOZA fumait…

Entre désirs et faux-besoins

Spinoza fumait. Selon ses biographes : « Il se divertissait aussi quelquefois à fumer une pipe de tabac » [1]. Il n’en était donc clairement pas dépendant. C’eût été d’ailleurs opposé à sa sobriété de vie et sa conception de la liberté : « Il ne dépensait pas six sous par jour l’un portant l’autre, et ne buvait qu’une pinte de vin par mois » [2]. Il est donc un peu paradoxal d’appeler Spinoza à l’aide dans la lutte contre le tabac. C’est pourtant ce que fait Jean-Pierre Vandeuren [3]. Il invoque le flottement d’âme, dissonance cognitive où Spinoza place le sujet face à deux désirs contradictoires, l’un animé par la joie, l’autre par la tristesse. En transposant sur la fume, c’est opposer le plaisir à fumer (détente, concentration, convivialité) au plaisir triste négatif à éviter la maladie, des dépenses importantes.

Selon Vandeuren, « le but des campagnes de communication anti-tabac est de tenter de renforcer le désir de s’abstenir de fumer en accentuant le sentiment de tristesse qui en est la base, afin qu’il domine le désir de fumer ». La faiblesse de ces campagnes, qui peut expliquer leur faible efficacité, serait d’abord qu’elles se basent sur la raison : « Rien de ce qu’une idée fausse a de positif n’est supprimé par la présence du vrai en tant que vrai ». Eth IV, 1 [4]. Même s’il s’en défend effectivement et prétend qu’il fume parce qu’il aime ça, le fumeur sait que ce plaisir est illusoire et fugace. Après les premières bouffées, ressenties comme agréables car elles soulagent le sentiment pénible de manque, il trouve vite désagréable le goût des dernières et l’odeur du tabac froid. Très vite d’ailleurs, il ressent le sentiment désagréable de culpabilité lié à son impuissance à s’arrêter, malgré la connaissance de tous les aspects négatifs de son comportement : « Le désir qui naît de la connaissance du bon et du mauvais, en tant qu’elle est relative à l’avenir, peut plus aisément être contrarié ou éteint par le désir de choses qui sont présentement agréables. » Eth IV, 16. Hormis cet aspect temporel, qui fait préférer un plaisir immédiat certain au plaisir aléatoire et lointain d’échapper au cancer du poumon, Vandeuren invoque à nouveau Spinoza : « Le désir qui naît de la joie est plus fort, toutes choses égales d’ailleurs, que le désir qui naît de la tristesse » (Eth IV, 18). L’inefficacité relative des campagnes actuelles tenant à ce qu’elles insistent sur les risques de maladies liées au tabac, il suggère d’ « exploiter subtilement la joie naturelle que nous portons pratiquement tous à vouloir protéger les enfants et donc à les éloigner du désir de fumer ». Il donne pour exemple un spot thaïlandais [5].

J’avoue ne pas être convaincu par ce spot. D’abord, il met en scène l’interdiction de fumer et la leçon de morale sur les dangers de la cigarette que font à leurs enfants les adultes qui fument, ce qui est tout à fait ce que Vandeuren reproche aux campagnes publicitaires. On peut y ajouter les images complaisantes montrant l’élégance attractive du geste de ces jeunes adultes, quasiment adolescents apparemment très sains, quand ils tiennent leur cigarette et soufflent leur fumée. Mais la chute est que les enfants remettent à leurs parents un billet où est écrit : « Vous vous faites du souci pour moi, pourquoi pas pour vous-mêmes ». Suivent les coordonnées d’une ligne téléphonique pour arrêter de fumer. Il s’agit dont de culpabiliser les parents, sentiment négatif s’il en est, et d’éveiller chez eux un autre sentiment négatif portant sur le risque à fumer. C’est tout à fait contraire au but poursuivi, malgré le cocorico qui affirme que les appels téléphoniques ont augmenté de 40% après la diffusion de ce spot (ce beau résultat figure déjà étonnamment dans le spot !). Cette démarche triste ne peut donner aux campagnes une force persuasive. Selon moi, la seule joie véritable que peut espérer puis ressentir un fumeur est celle d’une liberté reconquise.

Spinoza fabriquait des verres de lunettes et avait remarqué la contraction de l’iris lors de l’adaptation à la distance, que Descartes attribuait à la glande pinéale qui mettait en mouvement les esprits animaux. Il avait certainement connu le travail de Harvey décrivant la circulation du sang. Mais il n’avait aucune idée des découvertes modernes sur les régulations physiologiques automatiques et leur complexité. C’est pourquoi, lorsqu’il disait que « le désir est l’essence de l’homme », il n’avait en vue que l’affect, émotionnel. Ainsi, « Lorsque par exemple nous imaginons quelques mets dont nous nous délectons, nous désirons par là même en jouir, donc en manger. Mais… l’estomac se remplit…. la présence de l’aliment que nous désirions deviendra odieuse… ce que nous appelons Répugnance et Dégoût » (Eth III, 59). Curieusement, le mot de Faim n’apparaît pas dans ce discours. Or il s’agit d’une prise de conscience essentielle à la survie, d’un Besoin comme celui de boire ou de respirer. Un Besoin, c’est un esclavage nécessaire, commandant un comportement impératif car VITAL. Il ne s’agit pas d’un Désir, que l’on peut apprendre à dominer sans dommage.

Le propre d’une dépendance, au tabac comme à d’autres drogues, c’est justement que, pour des raisons biochimiques non encore éclaircies, leur usage a déclenché un Besoin Acquis qui exige la répétition de la consommation. Or ce statut de Besoin crée l’ILLUSION ABSOLUE que fumer est indispensable à la survie. Bien qu’il ait conscience qu’arrêter ne signera pas sa mort imminente, le fumeur ressent sa cigarette comme une exigence VITALE. Ainsi, une campagne devrait déjà aider à différencier clairement un Besoin d’un Désir, et à comprendre l’illusion des besoins acquis, qui sont contrôlables.

Lorsque émerge chez un fumeur un véritable Désir d’arrêter, il ne me semble pas issu du sentiment négatif de se protéger de la maladie, lointaine et peut-être évitable ou guérissable. Son véritable Désir, profond et positif cette fois-ci, c’est de ce libérer de cet esclavage, un désir de LIBERTÉ. C’est là que le message de Spinoza prend toute sa force. Rendant l’homme responsable de lui-même, il restaure sa dignité, son autonomie. C’est en lui que le fumeur doit trouver le moyen de se libérer. Qui veut sincèrement l’aider doit simplement tenter de lui faire prendre conscience des automatismes vitaux, mais aussi des faux-besoins qu’il a acquis par apprentissage, qu’il peut contrôler également par apprentissage puisqu’ils ne sont pas vitaux, malgré l’illusion qu’ils en donnent. Seul son désir d’arrêter lui permettra de mettre en œuvre ce contrôle. Mais ce ne peut être qu’un désir de liberté, démarche positive qui l’amènera aussi à se libérer de ceux qui, prétendant l’aider, ne cherchent qu’à profiter de son asservissement, idéologies de toutes sortes, multinationales vendeuses d’orviétan, charlatans, sectes et gourous.

Robert MOLIMARD

[1Colerus-Lucas. Biographies de Spinoza. Texte numérisé par Serge Schoeffert - édition H.Diaz http://www.spinozaetnous.org

[2la pinte d’Amsterdam valait 0,917 litres

[4Spinoza. Ethique. Puf- Philosophie d’aujourd’hui . Traduction et commentaires de Robert Misrahi. (1990) 1 vol.499p

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